La publication d'une demande de brevet ne rend pas caduc un accord de confidentialité

Contrats de l'entreprise Propriété Intellectuelle
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Le 17 mai 2023, la Cour de Cassation a rendu une décision inédite, mais logique, sur l’articulation entre un accord de confidentialité et la publication d’une demande de brevet.

En l’espèce, une société spécialisée dans la fabrication de fil pour l’industrie textile avait développé un nouveau fil innovant.

Dans le cadre de son activité commerciale et du développement de son innovation, elle avait ainsi conclu un accord de confidentialité avec un de ses partenaires, portant notamment sur le développement d’un fil répondant aux standards des normes anti-feu avant d’en déposer la demande de brevet, le 16 avril 1997.

Plus tard, la société titulaire du brevet a constaté l’exploitation par son partenaire, d’un fil dont les caractéristiques correspondaient aux revendications de la partie française de son brevet.

Elle a ainsi décidé d’assigner cette dernière en contrefaçon.

La société défenderesse a invoqué la fourniture, avant le dépôt du brevet, d’un fil correspondant aux caractéristiques de ce dernier, et a ainsi formé une demande reconventionnelle en nullité du brevet pour défaut de nouveauté.

A l’occasion de ce litige, la société défenderesse a produit différents documents (notamment des factures) portant sur le produit breveté.  

La société brevetée a demandé de voir écarter ces pièces, produites en violation de l’accord de confidentialité.

La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 12 septembre 2019, a considéré que ces documents sont recevables au motif que la publication du brevet aurait eu pour effet de rendre caduc l’accord de confidentialité en question.

La Cour de Cassation censure cette décision en rappelant que l’effet de la publication est de rendre public uniquement les éléments techniques du brevet. De ce fait, la publication ne peut avoir pour effet de libérer totalement le débiteur de son obligation de confidentialité, concernant les autres documents échangés dans le cadre de l’accord.

Ainsi, la société défenderesse ne pouvait se prévaloir de certaines pièces qui étaient couvertes par un accord de confidentialité.

La Cour se prononce ainsi pour la première fois sur la question de l’effet de la publication d’un brevet sur des documents techniques, en lien avec l’invention, et couverts par un accord de confidentialité mais sa décision ne suscite pas réellement de surprise.  

Un accord de confidentialité peut en effet couvrir de nombreuses informations sensibles qu’elles soient de nature technique, économique ou encore financière. Ainsi, dès lors que la publication d’une demande de brevet rend public certaines informations techniques contenues dans l’accord de confidentialité, les parties sont toujours tenues à la confidentialité concernant les autres informations.

La solution confirme, si besoin en était, l’intérêt de conclure des accords de confidentialité dans le cadre de projets innovants.

Josquin Louvier