DROIT DES CONTRATS : COVID, FORCE MAJEURE OU EXCEPTION D’INEXECUTION ?

Contrats de l'entreprise
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Dans notre NEWSLETTER du 14 avril 2020, nous rappelions le régime de la force majeure, alors que nous n’étions qu’à l’aube de la crise sanitaire liée au COVID-19, en précisant que cette notion devait s’appliquer à une obligation, et non au contrat dans son ensemble.

 

Ainsi, la force majeure, telle que définie à l’article 1218 du Code civil, permet notamment au débiteur d’une obligation, d’en suspendre l’exécution, lorsque cette exécution est empêchée temporairement par un cas de force majeure.

 

Une confusion s’opère généralement à ce propos, et il est tentant d’utiliser la notion de force majeure pour s’exonérer de l’exécution d’une obligation, lorsque c’est la contrepartie de cette exécution qui est empêchée ou lorsqu’on a été dans l’incapacité de profiter de cette contrepartie.

 

L’exemple typique fut, durant les périodes de confinement, le fait d’arguer de l’impossibilité d’ouvrir un établissement au public afin de tenter de suspendre l’exécution de l’obligation de payer son loyer.

 

Or, lorsque l’on invoque la force majeure afin de suspendre l’exécution de son obligation, il faut toujours s’interroger sur ce qui est empêché par le prétendu cas de force majeure : dans le cas d’un contrat de bail, le locataire peut jouir du bien loué, en contrepartie de son obligation du paiement du loyer.

 

Si la situation ne lui permet pas de jouir du bien loué conformément à ce qu’il en attendait, mais qu’il n’est pas empêché d’en payer le loyer, il ne s’agira pas d’un cas de force majeure. En effet, la situation ne l’empêchant pas de verser la somme convenue, il ne peut s’exonérer de son obligation.

 

Cela a été rappelé de façon nette par la Cour de cassation, qui a jugé dans un arrêt du 25 novembre 2020, en application de l’article 1218 du Code civil, que « le créancier qui n’a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure ».

 

Cet arrêt est particulièrement intéressant en ce qu’il s’agit du premier rendu par la Cour de cassation sous l’empire des nouveaux textes du Code civil.

 

La suspension de l’exécution de l’obligation pour force majeure ne doit pas être confondue avec le mécanisme de l’exception d’inexécution, qui a vocation à jouer lorsqu’une partie n’exécute pas son obligation, en permettant à son cocontractant de refuser d’exécuter sa propre obligation.

 

Lien vers l’arrêt : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000042619557

 

Pierre BRASQUIES