La radiation d'une société ne protège pas son dirigeant
L’attribution de la personnalité morale à un groupement est un point fondamental en droit des sociétés, en ce qu’elle lui confère la capacité juridique.
On sait que la naissance de cette personnalité morale a toujours pour origine l’immatriculation de la société au Registre du Commerce et des Sociétés. Toutefois, la fin de la personnalité morale de la société ne peut être traitée si simplement : de nombreux événements ponctuent les derniers souffles de la société, et tous n’ont pas pour effet de mettre un terme à sa personnalité morale.
Il en va ainsi de la radiation : si c’est l’immatriculation qui fait naître la personnalité morale de la société, la radiation de cette dernière n’emporte pas sa perte.
L’arrêt rendu le 24 juin 2020 par la chambre commerciale de la Cour de cassation est particulièrement intéressant puisqu’il rappelle utilement que la radiation d’office d’une société du registre du commerce et des sociétés pour cessation d’activité n’a pas pour effet d’éteindre sa personnalité morale. La Cour en tire la conséquence logique du maintien des fonctions du dirigeant de la ociété.
Sur ce point, la Cour de cassation précise que la radiation n’a aucun effet sur le mandat du gérant.
Il en résulte donc qu’en l’absence de révocation de ce dernier, d’une part il détient toujours le pouvoir d’engager la société, et d’autre part, sa responsabilité peut toujours être engagée au titre des obligations dont il est débiteur au titre de ce mandat.
Ce arrêt apporte des éclairages importants sur la radiation, mais laisse subsister des zones d’ombres, notamment lorsqu’un changement de dirigeant social intervient de façon concomitante à la mesure de radiation : lequel du gérant nommé en assemblée générale, ou du gérant figurant encore sur l’extrait K-bis peut engager la société ? La nomination par l’assemblée des associés l’emporte-t-elle sur l’opposabilité ?
Pierre BRASQUIES